Cette
communication à deux voix tentera de mettre à jour les complémentarités des
regards d’une historienne de l’architecture et d’une historienne du cinéma sur
un objet commun.
Paris-chantiers : filmer les transformations urbaines
L’avènement de la modernité avait consacré Paris comme la
« ville lumière ». Entrepris à partir des années 1950, les grands
travaux s’inscrivent dans la quête constante de maintenir, à échelle
internationale, Paris dans la liste des grandes métropoles. Maurice Doublet,
préfet de Paris, déclare ainsi en 1966 : « l’essentiel, c’est de
faire en sorte (…) que Paris puisse être à l’heure du XXème siècle »[1].
En impressionnant les transformations de la capitale sur la pellicule, le cinéaste endosse volontiers le rôle de témoin, de « passeur » de ces époques révolues et de ces quartiers disparus. Le traitement qu’il réserve aux grands projets est tour à tour nostalgique ou critique, souvent porteur d’une note négative. Selon le cinéma, la modernité serait-elle entrée par effraction dans Paris ? Quelle image de Paris le cinéma tente-t-il de conserver ? Comment l’architecture peut-elle finalement être détournée pour créer à son tour de la fiction ? La mise en œuvre des grands travaux occasionne inévitablement des chantiers immenses, réputés longs et difficiles. Derrière les palissades, ils sont perçus comme des friches, des zones interdites dépeuplées ou dangereuses, propices à l’émergence de fantasmes. Ainsi, comment le cinéma élève-t-il la ville-chantier au rang d'espace filmique ?
Deux photogrammes du film de Marco Ferreri, Touche pas à la femme blanche ! (1974)